webGuinée/Histoire & Politique


Bernard Charles
Le rôle de la violence dans la mise en place des pouvoirs en Guinée (1954-58)

pp. 361-72, inL’Afrique noire française : l’heure des Indépendances
CNRS Editions. Paris. 1992. 729 p.


Du même auteur
Guinée
Cadres politiques et administratifs dans la construction nationale en Guinée

« Toute l’histoire est fondée sur l’usage de la force et de la violence; si notre leader et fondateur a jeté les bases de quelque chose, ce sont les principes d’une politique d’État de violence et de teneur. » Ce jugement porté récemment par un historien sur l’évolution soviétique de son propre pays nous paraît aussi s’appliquer singulièrement au cas de la de République de Guinée et à son fondateur Sékou Touré. Que la violence soit au coeur même de ce régime, il n’est que de se rappeler la succession quasi annuelle des « complots » qui défrayèrent la chronique et leur répression avec ses deux paroxysmes en 1971 et 1975.

Mais la violence, dans ses diverses formes, n’est pas apparue brusquement dans un régime qui se voulait révolutionnaire et qui, par là même, générait la contre-révolution, selon les termes de Sékou Touré. On la trouve aux origines mêmes du régime touréen, lors de sa mise en place dans les années qui précédèrent l’indépendance, soit de 1954 à 1958. Dans cette brève communication, nous nous efforcerons de saisir quel fut son rôle dans la dislocation de l’ordre colonial en Guinée, dans l’établissement des bases du pouvoir personnel de Sékou Touré, dans la neutralisation ou l’élimination des adversaires, dans le contrôle de la population et dans la mise en place des institutions du nouveau régime. Nous nous appuierons tant sur les archives officielles qui commencent à être ouvertes aux chercheurs que sur les documents rassemblés au fil des années depuis 1959.

Si des incidents impliquant l’usage de la violence physique eurent lieu dès 1945, c’est surtout à partir de 1954 qu’ils se produisirent systématique ment jusqu’au référendum du 29 septembre 1958 par lequel la Guinée accéda à l’indépendance. Trois paroxysmes (juillet 1954-février 1955; septembre-octobre 1956 ; avril-mai 1958) ne sauraient faire oublier qu’ils s’échelonnèrent en fait tout au long de ces cinq années. Ils accompagnent une vie politique effervescente et ponctuée par une succession d’élections législatives (juin 1954, janvier 1956), municipales (novembre 1956), territoriales (mars 1957) et aux conseils de circonscription (mai 1958) avec leurs innombrables réunions publiques, un corps électoral multiplié par trois. L’enjeu est très clair: d’abord la conquête du pouvoir, puis sa consolidation par tous les moyens.
S’insèrent dans ce continuel remue-ménage électoral les activités des partis politiques. Le PDG, branche du RDA, qui, après avoir failli disparaître en 1949-1951, retrouve des forces au sein des masses par le biais des syndicats cégétistes et se pose en parti largement majoritaire. Face à lui s’érigent la DSG (octobre 1954), branche du MSA (en janvier 1957), etle BAG (décembre 1954) qui s’uniront en 1958 pour former la section guinéenne du PRA aux fins du référendum de 1958. Les syndicats ne manifestent pas moins de vitalité par-delà leurs divergences idéologiques et leurs affinités politiques: CGT qui, par scissiparité, devient CGTA en s’affranchissant de la métropolitaine tout comme procédera la CFTC. Chacun, parti ou syndicat, ayant ses congrès à l’échelle du pays ou à celle de l’Afrique occidentale française …
Le tout sur marche accélérée vers l’indépendance et remise en cause des clivages sociaux.
Certes, d’autres territoires de l’Ouest africain français connurent semblables bouillonnements. Peu, semble-t-il, furent autant marqués par la multiplicité des incidents, près de quatre cents ayant troublé l’ordre public, et le recours à la violence physique. Les rapports affluent quasi journellement chez les responsables signalant ici un groupe de femmes s’en prenant à un chef de canton, là des bagarres au marché entre partisans de Barry Diawadou et fidèles de Sékou Touré, ailleurs que des maisons sont assiégées par plusieurs centaines de manifestants, qu’une fête est troublée par un groupe du parti adverse ou que les passants se voient contraints d’acheter des cartes d’adhérent.
Les campagnes électorales, si fréquentes, peuvent être suivies à la trace avec leur cortège d’interventions policières, gendarmes ou gardes de cercle. Et c’est à qui empêchera l’adversaire de tenir ses réunions, organisera des contremanifestations et des défilés où pleuvent de part et d’autre pierres, insultes et coups.
Mais l’intensité des incidents et leur extension sont sans doute spécifiques de la Guinée. Pour ne s’en tenir qu’à une définition simple de l’incident « grave» quant aux personnes, c’est-à-dire celui qui entraîne des morts ou blessés on peut en effet recenser, de juin 1954 à octobre 1958, un minimum d’environ 75 pour l’ensemble de la Guinée , certains pouvant s’étendre sur plusieurs jours. Ils occasionnèrent, selon les chiffres officiels, 48 morts et plus vraisemblablement au-delà de 70. Les plus dramatiques éclatèrent à Conakry du 29 septembre au 5 octobre 1956 et du 1er au 5 mai 1958. Un paroxysme est atteint dans ce dernier cas puisque le rapport transmis au ministre de la France d’ outre-mer considère, comme « très loin de la réalité », le bilan officiel des victimes qui dénombrait cependant 26 morts (il faudrait en compter plus de 40) et plus de 400 blessés.
Une évaluation même grossière du nombre des blessés est encore plus difficile à établir puisque, souvent, les rapports de police se contentent de signaler de « nombreux blessés» et que les victimes ne se font pas toujours connaître, bien loin de là, ni ne sont revendiquées par les partis antagonistes.
Au total, pour la même période, le chiffre minimal devrait s’établir aux environs de 1 500 victimes, dont un millier pour Conakry. Les deux régions du pays les plus affectées seraient, et de loin, la basse Guinée (avec principalement Conakry, Forécariah, Boké), et la Guinée forestière (Nzérékoré et Macenta) tant par le nombre d’incidents graves que par celui des victimes (voir tableau en annexe). Pour les années 1954-1959, on en trouverait une confirmation avec l’indemnisation des victimes : 8,7 millions de CFA sur 10 inscrits au budget local pour 166 sinistrés de la basse Guinée (Conakry, Boffa, Dubréka et Forécariah) . Toutefois, si on tient compte de l’ensemble des incidents, ils se seraient produits à 70 % en basse Guinée, le reste se répartissant à peu près également dans les trois autres régions: Fouta, haute Guinée et Guinée forestière.

Pour obtenir une impression plus précise encore du caractère tumultueux de la période, il faut prendre en considération d’autres manifestations de la violence comme le nombre de cases et maisons brûlées, saccagées ou pillées pour raisons politiques ou autres (antagonismes ethniques , terrains de culture) ; les innombrables lapidations d’adversaires et du service d’ordre, les pierres ayant été l’arme par excellence des fauteurs de troublé ; les centaines d’arrestations dont le chiffre semble avoir été fortement exagéré par les divers antagonistes ainsi que les condamnations, elles aussi beaucoup moins nombreuses, eu égard aux événements, que ne le laissent entendre les propagandes partisanes. Dans le rapport déjà mentionné sur les troubles de mai 1958 à Conakry, son auteur indique « chiffre dérisoire » pour les arrestations et condamnations !
Autre exemple, le gouverneur signalait en septembre 1958 qu’un village entier, celui de Koundara, avait été incendié . Dès lors, il n’est pas surprenant que se soit établie une psychose de la violence provoquant des réactions de crainte, voire de terreur, et enclenchant le cycle des représailles où se diluent les responsabilités des affrontements. Déjà en 1955, un président signalait que les « incidents ont engendré parmi les patrons africains membres de notre syndicat une psychose de crainte pour le présent et d’anxiété pour l’avenir » . Maints autres exemples touchant les diverses catégories sociales pourraient être fournis : « atmosphère de terreur » à Siguiri en juillet 1956 Aussi devient-il souvent illusoire de rechercher qui a déclenché les troubles, tout au moins au niveau des simples exécutants.
Dans un tel climat, un autre élément acquiert une importance primordiale. Les incitations à la violence jouent un rôle de détonateur et d’amplificateur. Les effets peuvent en être suffisamment dissuasifs pour éviter de passer aux actes. A cet égard, les discours des chefs de parti ou des candidats aux élections sont très révélateurs ainsi que les démarches auprès de l’administration qui prennent souvent un ton comminatoire ou d’ultimatum. La « violence verbale» est de règle. C’est le langage de l’agressivité, de la lutte, du combat à finir. Nouveau député en 1956, Sékou Touré s’écrie à Macenta:

« Si vos chefs vous obligent à des travaux forcés, refusez. S’ils vous injurient, injuriez-les à votre tour. Si quelqu’un vous frappe, frappez-le même si c’est un gendarme. Si vous êtes incapables de frapper vous-même, allez chercher des camarades militants » 10

L’adversaire doit être non seulement combattu, mais détruit moralement à défaut de l’être physiquement; il faut le discréditer totalement. Donnons-en quelques exemples qui pourraient être multipliés à loisir. Dans une lettre du 10 avril 1957 au commandant de Forécariah, le chef de canton de Morebayah-Kaback dénonce ses adversaires RDA qui auraient déclaré au cours d’une réunion: « Nos partisans sont libres de faire ce qu’ils veulent, nous pouvons saccager la concession du chef de canton … Cette fois il ne faudra pas le rater, il faudra l’égorger comme un poulet. Personne ne nous blâmera, car l’administration est avec nous. » 11
Dans un éditorial du 16 mai 1958, le journal du PDG écrit, sous le titre « Ils ne passeront pas » : « Il leur faut engendrer le désordre et la haine, la destruction et la misère. Il leur faut des morts et des victimes expiatoires pour payer leurs fautes et se sortir de l’oubli où les a relégués la volonté populaire.
Espèrent-ils donc dans leur criminel orgueil pouvoir rétablir leur fortune sur les cadavres de nos morts, les cendres de nos cases et les ruines de nos maisons ? [ … ] Et pour quelle fin ? Pour aucune autre fin que celle de leur seule ambition d’hommes qui ont échoué et ne s’y résignent pas. Pour rien d’autre que le rétablissement de leurs dérisoires privilèges, l’assouvissement de leur dangereuse vanité. » 12
Pour sa part, le député Barry Diawadou, chef du PRA, se déplaçait alors avec une mitraillette en bandoulière et n’hésitait pas à répéter en public, voire devant de hauts fonctionnaires, que son parti riposterait immédiatement aux provocations : « Cent pierres pour une pierre jetée, cent coups de fusil pour un coup de fusil reçu » 13. Il s’écriait :

«Nous sommes prêts, même si nous devons installer ici l’anarchie et le désordre, à nous battre pour notre cause. »

Dans le même temps, Sékou Touré, son adversaire de toujours, devenu vice-président du Conseil, lançait à la population, un curieux appel au calme en précisant: « Nous savons que ceux que le suffrage universel a éliminé de l’arène politique et ceux qui sont privés des moyens d’exploitation des masses paysannes du fait de la mise en application de nouvelles structures administratives, économiques et sociales et des institutions démocratiques votées par l’Assemblée territoriale sont en désarroi et se livrent à des provocations ouvertes contre l’ordre public. » 14
Et Barry Diawadou de lui rétorquer, deux mois plus tard, dans un éditorial cinglant :

« Il se déroule actuellement en Guinée française un véritable drame qui, pour être couvert par des officiels, n’en est que plus horrible [ … ]. En d’autres termes, le leader RDA a célébré sans risques les funérailles de la légalité pour qu’enfin la force prime le droit, transformant sa majorité en hystérie guerrière [ … ]. Le martyr de la Guinée dure depuis quatre ans [ … ]. De larges couches de la population livrées au matraquage inhumain du RDA se posent la question lancinante : « Qui arrêtera le drame » 15

La question des responsabilités quant à l’implantation d’une « dynamique de violence» au sein de la société guinéenne n’est pas simple. Elle se posait depuis longtemps, non seulement aux protagonistes dans leurs efforts de justification auprès de l’opinion guinéenne mais aussi, évidemment, aux autorités du territoire ainsi qu’à celles de la métropole.
Mentionnons tout d’abord l’existence et la perpétuation d’une très ancienne forme de violence, « légale » celle-là, puisque exercée par la chefferie de canton dans le cadre et sous le couvert de l’administration coloniale. Les rapports administratifs et les plaintes des populations soulignent tant et plus les extorsions par la force, les exactions et la brutalité des chefs 16. Leur dénonciation sans relâche fournira au PDG-RDA un magnifique tremplin pour se rallier la population rurale, sauf au Fouta. Par ailleurs, il semble bien que les luttes politiques prendront çà et là une coloration ethnique dans la mesure même où le bastion du PDG sera Conakry et la basse Guinée de population soussou alors que celui de ses adversaires BAG se situera au Fouta de population peulh avec un fort appui des chefs traditionnels de la région. Le fonctionnement de la chefferie et les antagonismes ethniques (activés au besoin) constituent comme une toile de fond pour les affrontements politiques. C’est à ces derniers que nous nous attacherons.
Deux enquêtes administratives et une mission de l’Assemblée de l’Union française apportent une réponse. Leurs conclusions ainsi que les jugements portés par les gouverneurs successifs de Guinée et certains fonctionnaires sont singulièrement convergentes, par-delà les nuances propres à chacun, quelles que soient les différences dues à une évolution sociopolitique extrêmement rapide du pays. Toutes concourent à faire porter une responsabilité écrasante au PDG-RDA et à son chef incontesté, Sékou Touré ?
Les premiers troubles graves 17, consécutifs à l’élection comme député de Barry Diawadou et à l’échec électoral de Sékou Touré, qui se produisirent de juillet 1954 à février 1955 sont analysés de manière très approfondie par l’inspecteur général H. Pruvost dès février 1955, suite à la mission que lui avait confiée le ministre de la France d’outre-mer, J. Juglas. Dans son sommaire chronologique, la quasi-totalité des incidents et bagarres ont été provoqués par des éléments RDA, la riposte de leurs adversaires pouvant à l’occasion aboutir à des blessés. Dans un rapport, il relève que « la responsabilité de Sékou Touré dans les émeutes récentes peut être évoquée sans verser dans la témérité 18 » et il en avance une explication: « Qu’il ait voulu — car les incidents ont été sans doute préparés, de même que le retour au calme fut nettement commandé … — donner un sérieux avertissement à l’Autorité française d’avoir à s’abstenir, lors des prochaines élections législatives du jeu qu’il lui prête, c’est une explication plausible des incidents, quant à l’immédiat : rancune du passé, inquiétude pour l’avenir personnel. D’aucuns estiment que Sékou Touré a été débordé sur sa gauche … On ne saurait, d’autre part, éliminer l’hypothèse d’une démonstration, à l’adresse du RDA orthodoxe, de l’efficacité de la branche, plus avancée, de Guinée. » 19
Pour lui, la gravité des troubles tient en ce qu’ils révèlent un « véritable noyautage de la population par le RDA » ; la mise en place d’une « organisation fantoche », même en brousse, grâce à laquelle le parti élimine rapidement … tous les éléments « réfractaires au RDA », y compris les chefs coutumiers ; l’objectif de l’« éviction ou de la quasi-éviction française».
La portée politique de ce qui se jouait en Guinée n’avait pas échappé, non plus, aux dirigeants du RDA à l’échelle de l’Afrique. Le responsable politique du comité de coordination, Ouezzin Coulibaly, se rendit en Guinée. Sa venue et les instructions en sept points, qu’il adressa le 12 février 1955 aux responsables du PDG, constituèrent un véritable cran d’arrêt … provisoire.

« Le RDA a un organisme directeur [ … ] auquel tous les adhérents doivent obéissance. Le RDA est un parti de gouvernement [ … ]. Il tient donc avant tout au respect de la légalité républicaine et à l’ordre [ … ]. Ses responsables doivent enseigner [ … ] que la possession d’une carte RDA ne confère à personne le droit de se soustraire à la légalité [ … ]. Le RDA est loin d’être un parti d’agitation [ … ]. Le RDA interdit toutes les manifestations à caractère fasciste, telle la création de groupes de choc, des dénommés commissaires et gendarmes avec port de brassards et galons sur la voie publique [ … ]. Il doit enseigner le respect de la liberté des citoyens [ … J. Personne n’a le droit de se rendre justice. » 20

Sékou Touré dût, de plus ou moins bon gré, s’incliner et répercuter ces instructions dans un communiqué du bureau exécutif du PDG. Il y était affirmé « avec vigueur que le programme du RDA ne peut comporter rien de subversif et que ses activités ne peuvent tendre à provoquer du désordre ou des incidents ! » 21

En novembre 1956, la mission Chiarisini 22, venue s’informer sur les émeutes du mois précédent (8 morts et 263 blessés), retracera le fil des événements en remontant à juillet 1954 et s’efforcera, elle aussi, d’en établir les causes et d’en dégager les conséquences. Ses conclusions sont on ne peut plus claires :

« La responsabilité du PDG apparaît entière au cours des incidents qui se sont déroulés en Guinée depuis juillet 1954. »

La mission dresse encore le catalogue des moyens d’actions utilisés par le PDG dans sa conquête systématique du pouvoir: violences contre les personnes et les biens des non-PDG, hiérarchie parallèle avec le port d’insignes de « fonctions », noyautage de la police 23 et de l’administration, recours systématique à la calomnie et à des méthodes franchement illégales contre les « îlots de résistance » (administration, forces de l’ordre autres que la police, adversaires politiques qualifiés de « saboteurs », chefs coutumiers). Nous avons là, sous des termes analogues, sinon identiques, les mêmes caractéristiques et constats que ceux établis par H. Pruvost sans que, semble-t-il, les membres de la mission en aient eu connaissance. Dans l’un et l’autre cas, les auteurs réfutent également, avec des arguments de poids, chacune des explications (de type socio-économique ou politique) avancées par le PDG sans vouloir pour autant exonérer de toute responsabilité les adversaires politiques de celui-ci.
Toutefois, le contexte politique est devenu tout autre avec l’élection des deux principaux responsables du PDG-RDA comme députés en janvier 1956, la reconnaissance de ce statut avec ses prérogatives par l’administration, les changements de gouverneur en Guinée et de gouvernement en France. Sur ce point, la mission Chiarisini ne s’est pas fait faute de souligner la« politique contradictoire de Paris » 24. Mais c’est surtout l’adoption de la loi-cadre Defferre en juin 1956 qui vient bouleverser fondamentalement les institutions et les règles du jeu (collège unique et suffrage universel, conseil de gouvernement et élargissement des pouvoirs de l’assemblée territoriale).
À vrai dire, l’enjeu pour le PDG n’est plus de conquérir le pouvoir mais de l’exercer seul sans opposition. Une véritable lutte à finir s’engage avec ses adversaires. Plus question de se soucier des instructions de O. Coulibaly, elles sont devenues lettres mortes. L’action du parti s’est perfectionnée dans ses méthodes, les mêmes que celles de 1954, mais utilisées de manière plus radicale. Ceci troublera quelque peu le nouveau gouverneur de Guinée dont l’un des objectifs était d’aboutir à une « période de décantation puis de stabilisation politique » 25 par la reconnaissance de la place majoritaire acquise par le PDG dans le système politique à la suite des élections de janvier 1956. Deux extraits suffiront pour le montrer. S’attachant à analyser, en octobre 1955, les causes profondes qui poussent les partis politiques à la violence, le gouverneur écrit :

« Il est un fait que le BAG fait figure de victime, qu’il a subi certainement de nombreuses atteintes et [qu’]il couvrait déjà l’ensemble des citadelles que le RDA agressait systématiquement. Mais [ … ] ce rassemblement de victimes prit conscience de sa force et songea désormais à se défendre puis à prévenir les attaques. Lancée des bastions solides tenus par le BAG dans les chefferies et autour de l’administration, cette contre-attaque eut beau jeu pour se développer devant le caractère fruste et maladroit du RDA. » 26
L’année suivante, à la suite des nouveaux troubles survenus en octobre 1956, il note: « Le RDA majoritaire à 80 % à Conakry, normalement destiné à prendre demain des responsabilités majeures dans le pays, ne devrait pas avoir besoin de recourir à la violence comme voie d’expression normale [ … ]. C’est dans la nature profonde du RDA-Guinée que l’on peut trouver [ … ] la raison d’une attitude qui recherche le désordre, paralyse la vie du territoire, sape les confiances et aboutit à faire régner une véritable terreur sur tout ce qui ne relève pas du parti. » 27. Avant d’ajouter de manière désabusée, mais prémonitoire : « Après avoir pendant un an essayé avec lui de construire, j’en viens à me demander s’il peut ou s’il a les moyens de mener à bien une action autre que violente [ … ]. Sa responsabilité paraît dans tous les cas engagée [ … ]. »

Dans le nouveau contexte créé par la loi-cadre et par les élections de mars 1957 qui consacrent la prise en charge officielle du pouvoir par Sékou Touré et son parti 28, on eût pu s’attendre à un relatif apaisement de la vie politique. En fait, c’est tout le contraire qui se produit. 1957 et 1958 sont les années les plus agitées de toute la période et aboutissent en mai 1958 à un embryon de guerre civile. Pour réduire à merci les opposants, Sékou Touré disposait désormais des leviers du pouvoir légal (une partie de l’administration, la police, puis la garde territoriale). Il va en jouer en virtuose sans grand contre-poids de la part d’une administration dirigée nominalement par un nouveau gouverneur 29 dont les pouvoirs vont être vidés de leur substance. Des mesures révolutionnaires, bouleversant les structures traditionnelles, quoique prévisibles depuis longtemps, sont adoptées rapidement, comme la suppression de la chefferie et la mise en place des municipalités élues … Mais l’exercice du pouvoir avec les décisions à prendre en matière budgétaire 30, en matière d’africanisation des cadres, d’affectation et de mutations de fonctionnaires, en gestion des conflits de travail… suscitent les déceptions chez les partisans tout en renforçant les opposants de toujours : BAG et DSG-MSA finalement groupés en PRA. S’y ajoutent un long conflit avec les enseignants, des tensions au sein même du PDG qui amènent Sékou Touré à exclure, au mépris des règles du parti, la section de Mamou31 en novembre 1957 …
Un retournement de situation se produit, et les moyens utilisés jusqu’alors par le PDG sont retournés à son encontre. Lui qui dénonçait systématiquement l’administration antérieure, taxée d’arbitraire, d’incompétence et de gaspillage, se voit aux prises avec une « certaine campagne antigouvernementale et antifiscale incitant la population à la rébellion et à la désobéissance aux lois » 32. Une telle campagne portait ses fruits sur la population comme en témoigne la distribution de tracts anti-PDG 33 à Conakry et à Kankan en novembre 1957 ou encore le grand meeting PRA du 13 avril 1957 avec deux mille à trois mille personnes, dans le calme, autour de Barry III et Barry Diawadou qui critiquèrent sévèrement Sékou Touré 34 tandis qu’une réunion du PDG en attirait trois fois moins.
Là encore, le recours à la violence va être déterminant: lapidations, agressions, incendies, bagarres et échaufourées provoquant morts et blessés.
Deux rapports établis par un inspecteur général de la France d’outre-mer, Gaston Boyer, permettent de faire le point sur les événements, leur origine, leurs causes et le rôle des autorités. Une constatation tout d’abord : les événements de mai 58 constituent la phase paroxystique de toute une série d’incidents (voir tableau en annexe) dont les prétextes sont de minime importance : actes de propagande, réunions publiques, voire simples actes de la vie administrative. On peut les résumer comme suit :

« Des agressions réciproques mais à prédominance Foulah-PRA en banlieue les 29 et 30 avril, auxquelles succèdent, en ville, dans la nuit du 2 au 3 mai « la Saint-Barthélemy de Guinée »), de très dures représailles (peut-être concertées à l’avance et en tout cas bien conduites) de la part des Soussous-RDA (commandos très armés, agents de liaison) laissant l’impression de vouloir atteindre des éléments dirigeants oppositionnels et impressionner la masse foulah. » 35

Si les responsabilités du recours à la violence sont partagées à l’origine (actes de propagande ou de provocations du PRA), elles ne le sont guère par la suite. L’auteur du rapport le reconnaît, dans un style « diplomatique », car Sékou Touré est quasi-chef de gouvernement, en écrivant: « Leur attitude [celle de S. Touré et des ministres] n’a pas été empreinte de l’impartialité et du sang froid nécessaires. Des immixtions et intrusions inadmissibles de leur part ont eu lieu dans les opérations [ … ] de maintien de l’ordre [… ] dans celles de police judiciaire [… ] et même dans le fonctionnement de la justice. » Et de souligner l’action de forts commandos très organisés; le comportement étrange, si ce n’est complice, de la police et de la garde territoriale qui relèvent de Sékou Touré et de son ministre Fodéba Keita; l’impossibilité d’obtenir d’eux de lancer un véritable appel au calme; agressions systématiques contre les dirigeants du PRA et destructions de leurs maisons alors qu’aucun des responsables du PDG n’a eu à subir de dégâts ni à craindre pour sa vie aux pires moments des troubles. Il est remarquable aussi que tout incite à penser que les représailles ont été concertées et organisées à l’avance. Sur ce dernier point, des témoignages imputeraient une responsabilité directe à Sékou Touré qui aurait donné des instructions en ce sens, tout comme en octobre 1956 36

Que la violence soit une caractéristique constante de l’action du PDG et singulièrement de son chef Sékou Touré dans les années 1954-1958, cela paraît incontestable. Sans aucun doute s’en sont-ils défendus parfois ou ontils affecté d’être débordés par elle à d’autres moments. Mais les argumentations qu’ils ont tenté de formuler lorsqu’ils y étaient contraints par certaines circonstances n’ont jamais été convaincantes ou n’étaient plus valables : explication par la misère des masses; exaspération de ne pas être reconnus comme représentants qualifiés de la population ; attitude d’opposition systématique de l’administration coloniale ; nécessité de se défendre contre les attaques et contre les provocations perpétrées par leurs adversaires BAG, DSG ou PRA ; pègre ne respectant aucune consigne 37. Du reste, lorsque les freins n’existeront plus, Sékou Touré n’aura aucune hésitation à proclamer la nécessité de la dictature … au nom du peuple et de la révolution.

Liste des incidents graves survenus en Guinée (juillet 1954-septembre 1958)

Lieu Date Conséquences
Conakry 3-7 oct. 54 1 blessé
31 janv. 55 1 mort, 44 blessés
10 janv. 56 29 blessés
9 avr. 56 6 blessés
29 sept.- 5 oct. 56 8 morts, 263 blessés
20 nov. 56 5 blessés
29 nov. 56 1 blessé
20 fév. 58 15 blessés
29 avr. 58 27 blessés
1-5 mai 58 26 morts, 392 blessés
Forecariah 19-23 sept. 55 2 blessés
28 sept. 55 8 blessés
31 mars 57 20 blessés
31 mars 57 3 blessés (à Moribaya)
2 avr. 57 10 blessés (à Benty)
19 mai 57 4 blessés (à Kaback)
3 mai 58 4 blessés (à Moussaya)
4 mai 58 2 blessés (à Koffio)
Coyah 21 nov. 54 3 blessés
2-3 oct. 55 1 mort, ? blessés
16 mars 57 1 blessé
Dubreka 9 déc. 54 7 blessés
8 fév. 55 1 mort, 30 blessés
Boffa 17 oct. 55 1 mort, 4 blessés
31 mars 57 1 mort, 3 blessés
Boke 15 juil. 55 23 blessés
2 mars 57 9 blessés
12 juil 57 5 blessés
18 juil. 57 5 blessés
11 fév. 57 5 blessés
Kindia 8 mai 58 1 mort, 3 blessés
Pita 21 mars 57 2 blessés
5 mai 58 2 blessés (à Gongoré)
Gaoual 20 mars 57 3 blessés
Youkounkoun 11 déc. 55 1 mort, 22 blessés
12 sept. 58 1 mort, 15 blessés
Kankan 5 mai 57 2 morts, 15 blessés
Kouroussa 16 fév. 52 blessés
Faranah 23 jan. 57 6 blessés
15 nov. 57 1 mort, 33 blessés
4 déc. 57 1 blessé
Dabola 20 mars 57 ? blessés
5 mai 58 2 blessés
Siguiri 21 mars 57 18 blessés
25 avr. 57 8 blessés
Nzerekore 8 déc. 56 38 blessés (à Lola)
18 déc. 56 10 blessés (à Boouon)
1er avr. 57 2 blessés (à Pela)
25 août 57 3 blessés (à Bounouma)
11-20 sept. 57 22 blessés
22 sept. 57 1 blessé
Macenta 30 mai 55 11 blessés
3 jan. 57 23 blessés (à Daro-Koadou)
23 août 57 2 morts, 7 blessés (à Kassandra)-
23-28 août 57 19 blessés
Kissidougou 17 sept. 57 3 blessés
11 déc. 54 5 blessés
22 nov. 57 1 blessé
Gueckedou 1 juin 55 1 mort

Cela dit, il faut reconnaître que la violence a été utilisée avec une extrême habileté et une grande efficacité pour conquérir d’abord un pouvoir de fait, puis un pouvoir de droit permettant successivement d’éliminer tous les adversaires.
Elle fut employée contre l’administration coloniale de plusieurs manières différentes. Le PDG dénonça inlassablement, impitoyablement, tout ce qui lui paraissait des abus dans son fonctionnement et dans ses rapports avec la population. La violence morale, par l’écrit ou la parole, fut l’arme par excellence: accusations justifiées ou non, plaintes auprès des autorités supérieures, démarches de toutes sortes (délégations, défilés, dénonciations publiques des comportements, campagnes de presse, etc.). Tout était prétexte à mettre en cause un commandant de cercle, un administrateur, pour peu que celui-ci ne soit pas favorable au parti. Des lettres partaient aussitôt chez le gouverneur à Conakry, chez le haut commissaire à Dakar; d’autres étaient envoyées à Paris (ministre de la France d’outre-mer, chef du gouvernement, président de la République). L’administration fut mise ainsi continuellement sur le qui-vive et obligée de se défendre. Un changement de commandant venait-il à se produire dans le cadre de la rotation habituelle des fonctionnaires, il était dû à l’action du PDG … Peu à peu, celui-ci réussit à instiller dans la population l’idée de sa puissance, puissance de moins en moins surfaite avec le temps. Ainsi, en 1954, lors de la visite en Guinée du ministre de la France d’outre-mer, la foule criait-elle déjà : « Sékou Touré est gouverneur de Guinée », et le parti fit ce jour-là une démonstration impressionnante de sa force 38
Par la suite, le PDG ne se contente plus de clouer au pilori les chefs de canton, maillon faible de l’administration coloniale, mais s’en prend à eux par la violence physique en organisant des manifestations où leurs biens et leurs personnes sont atteints dans leur intégrité physique. Le cas exemplaire est celui du chef de Tondon qui sera finalement destitué et dont l’une des victimes accidentelles sera faite héroïne nationale. En revanche, sauf exceptions rarissime 39, aucun Européen ne se verra pris à partie pas plus que les « bons » chefs traditionnels qui surent se dédouaner à temps.
En s’attaquant de la sorte aux chefs, Sékou Touré faisait coup double : il se gagnait une partie de la population, il faisait la preuve que l’administration n’était plus en mesure de les défendre ni de les maintenir. Cette dernière, déjà sous surveillance depuis 1955-1956, perd également toute initiative réelle avec l’entrée en vigueur de la loi-cadre de 1957, et le gouverneur ne fait plus que de la représentation officielle.
La généralisation de la violence à l’occasion des incessantes campagnes électorales, la terreur ou la crainte provoquée par les grandes explosions d’octobre 1956 et de mai 1958 manifestent à l’évidence que l’appareil d’État colonial n’a plus la capacité de maintenir l’ordre public, ce qui était son ultime raison d’être. Désormais, il n’est d’autre force que celle de Sékou Touré et du PDG. A quoi bon, dès lors, continuer à s’opposer à son pouvoir et à sa toute-puissance? Ne disposait-il pas d’ailleurs, depuis mars 1957, des instruments de la violence institutionnelle et légale (police, renseignements, affectation des fonctionnaires, pouvoir législatif) ? Bon gré, mal gré, les adversaires irréductibles ou quitteront la Guinée ou se rallieront. Quant aux fidèles, ils voient s’appesantir sur eux la poigne de Sékou Touré; leur mise au pas est déjà commencée avec l’expulsion des déviationnistes du parti, la dissolution de comités directeurs de section, l’interdiction des grèves.
L’enthousiasme suscité par l’accession à l’indépendance en octobre 1958 et la renommée internationale qui en résulte pour le pays font taire les oppositions et disparaître provisoirement les appréhensions quant à l’avenir.

Bernard Charles
Université de Montréal

Notes
. M. Manassiev, cité par B. Guetta, « M. Gorbatchev qualifie de “décision illégale” la proclamation de la Lituanie de son indépendance}), le Monde, 14 mars 1990.
. Ce décompte a été établi à partir de diverses sources, de rapports d’enquête sur les incidents les plus graves de Conakry ainsi que sur une partie de la presse Afrique nouvelle, la Liberté, le Montagnard) dont je n°ai pu dépouiller qu’un certain nombre de numéros.
. Rapports de M. Boyer, inspecteur général de la FOM, à monsieur le ministre de la France d’outre-mer, sur les incidents en Guinée, 2 et 4 juin 1958.
. Lettre n° 1513 de G. Defferre, ministre de la FOM, à Bangoura Karim. conseiller de l’Union française, 12 juin 1956.
. Le chiffre doit approcher le millier pour l’ensemble de la période, avec une recrudescence de 1954 à 1958 (plus de 130 pour les troubles de mai 1958 à Conakry).
. « Le RDA lapide les maisons du chef de village et de deux notables» à Kénindé/Dubréka en décembre 1954. Rapport de H. Pruvost sur les incidents de 1954-1955 en Guinée française.
. Gouverneur J. Mauberna, télégramme n° 334 du 14 septembre 1958 au ministre de la France d’outre-mer. Dans un autre cas, le chef local du PDG put dissuader 7 villages d’aller en démolir un autre où. résidait le chef de canton (rapport n° 755/4 du commandant du groupe de gendarmerie de Guinée, 10 octobre 1957).
. Lettre de L. Deleau, président du Syndicat patronal agricole de Guinée, au gouverneur, 5 octobre 1955.
. Motion de la sous-section RDA de Guinée, 12 juillet 1956.
10. Allocution à Macenta, 29 mai 1956.
11. Services de police, renseignements, n° 892/371, 18 avril 1957.
12. La Liberté, n° 2, 16 mai 1958.
13. Rapport M. Boyer, op. cit., 4 juin 1958.
14. Appel au calme radiodiffusé, 3 mai 1958 in « La vérité sur les événements de Conakry », Livre blanc, ministère de l’Intérieur, Guinée française.
15. La Voix du peuple, éditorial, « Qui arrêtera le drame? », 10 juillet 1958.
16. Voir J. Suret-canale, « La fin de la chefferie en Guinée}), Journal of African History, VU, 3, 1966, pp. 459-493.
17. Pour une thèse diamétralement opposée, voir S.K. Keita. Le PDG, Artisan de l’indépendance nationale en Guinée (1947-1958), Conakry, INRDG, 1978.
18. H. Pruvost, Incidents de 1954-1955 en Guinéefrançaise, 11 mars 1955, p. 21.
19. H. Pruvost, note sur les incidnets de 1954-1955 en Guinée, 12 mars 1955. Dans l’un de ses quatre rapports, il relèvera explicitement comme l’une des caractéristiques des troubles d’avoir été « délibérés et systématiques ».
20. O. Coulibaly, « Instructions aux responsables du PDG », in H. Pruvost, Incidents … annexe 3. Voir aussi J.R. de Benoist, L’Afrique occidentale française de 1944 à 1946, Nouvelles Éditions africaines, 1982, p. 216.
21. Communiqué du bureau du PDG, 18 février 1955, signé par les cinq membres du bureau exécutif (S. Touré, Abdourahamane Diallo, N’Famara Keita, Sinkoun Kaba, Camara Bengaly). Il semble qu’un ou deux membres du bureau furent alors contraints de le quitter.
22. « Rapport d’information fait au nom de la commission de politique générale sur la mission d’information chargée de rechercher les causes et les responsabilités des récents événements de Conakry, par MM. Chiarisini, Max André, Odru, Roulleaux-Dugage, conseillers de l’Union française ». Documents — Assemblée de l’Union française, annexe n° 135, 2e séance, 29 novembre 1956, pp. 168-176.
23. « Sa carence […] atteint un degré te! que l’on peut la considérer comme une véritable complaisance}) (elle serait d’ailleurs à 90 % pro-PDG). Rapport … op. cit., p. 174.
24. L’un de ses membres, M. Odru, ne s’est pas rallié au texte des 2e et 6e parties du rapport parce que, pour lui, « dans les événements de Guinée, ce sont les responsabilités gouvernementales [françaises) qui sont essentielles ».
25. Rapport n° 2726 du gouverneur Bonfils au haut commissaire à Dakar, 16 octobre 1956.
26. Lettre n° 520 au haut commissaire à Dakar, 22 octobre 1955.
27. Rapport n° 2726, op. cit.
28. Il est devenu vice-président du conseil du gouvernement qu’il a composé uniquement de militants ou sympathisants du PDG. Le gouverneur sera pour une courte période président dudit conseil. Le PDG détient la majorité absolue à l’assemblée territoriale.
29. Il s’agit de J. Ramadier qui a pris ses fonctions en novembre 1956.
30. Le conseil de gouvernement voulut imposer un prélèvement de 2 % sur les pensions et rentes viagères. Face à l’émotion suscitée par cette mesure chez les anciens combattants et militaires (150 000), il du la retirer. Rapport Boyer, op. cit., 4 juin 1956.
31. Dans une lettre n° 126, adressée le 2 août 1957, au comité directeur du PDG, la section affirmait que « sorti victorieux du scrutin du 31 mars […], le PDG n’a cependant cessé de péricliter dans sa vie intérieure en tant qu’organisation démocratique populaire ». Elle s’en prenait au non-respect des règles du parti par le comité directeur, au refus d’assurer l’indépendance dudit comité par rapport au conseil de gouvernement, à la décision d’attribuer un traitement mensuel de 85 000 francs aux membres de l’assemblée … [Texte gracieusement communiqué à l’auteur par M. Bela Doumbouya.)
32. S. Touré, « Appel au calme radiodiffusé », 3 mai 1958.
33. Tracts intitulés « Mouvement de la volonté du peuple » où on pouvait lire: « Le leader du parti majoritaire a menti, trompé, trahi le peuple ouvrier » ou encore « Venez à notre aide (…) contre cet intolérable dictateur. »
34. Gouverneur J. Mauberna, télégramme n° 80-81 du 14 avril 1958 au minime de la France d’outre-mer.
35. Rapport M. Boyer, op. cit., 2 juin 1958. 36. Témoignage du Dr Najib Roger Accar, qui était alors ministre de la Santé publique et chirurgien-chef de l’hôpital Ballay de Conakry. Entretien avec l’auteur (novembre 1989).
37. Sur ce point, il a souvent été rapporté que les commandos, les perturbateurs obéissaient au clairon, arrêtant net toutes actions de violence. De même celles-ci, en 1955 comme en 1956, cessèrent-elles aussitôt après que furent diffusés des consignes et des appels au calme sans équivoque.
38. Services de police, renseignements n° 125,31 octobre 1954.
39. Agression contre un juge d’instruction (services de police, renseignemenrs n° 971/369, 24 mai 1958) ; attaque de 2 Européens par un groupe de jeunes à Coyah (9 mai 1958).